Samedi 30 octobre 2021, 12h30.
Nous avons programmé depuis 3 jours notre départ pour KNYSNA, notre prochaine destination à quelques 100 miles à l’Ouest de notre position.
Le plan consiste à quitter le port à marée haute et attendre 3 heures à l’ancre dans la belle baie de St Francis, que le vent veuille bien baisser d’intensité et tourner dans « le bon sens » pour nous porter vers l’Ouest.
Sous quelques rafales à 20kts, nous quittons notre emplacement bien étroit, et nous frôlons les nombreux bateaux de pêche amarrés jusqu’au milieu du chenal.
ROXY évolue prudemment entre les jetées en béton, le temps de voir l’eau s’éclaircir en une masse sablonneuse et nous talonnons brutalement en effectuant un arrêt sur image ! Merde ! Caro se précipite sur la VHF pour demander du secours tandis que j’effectue une marche arrière à fond les ballons. Nous voilà revenus dans le bassin des pêcheurs en marche arrière, le palpitant aussi agité qu’un cocktail dans un shaker…
Certaines rafales ne sont pas évidentes à négocier, coincés entre les hauts-fonds et les nombreux bateaux de pêche, l’attente n’est pas simple.
La VHF frétille et les gars de la marina courent aussitôt sur le ponton avant de sauter dans un canot en notre direction.
Une VHF à la ceinture, un grand gaillard nous lance :
« Follow me » d’un air désolé, la main droite agitée en direction de la sortie…
« Ouais ouais, on te follow you mon gars, mais je vois pas comment on va sortir la quille d’ici ‘mi ! »
Nous avions pourtant suivi à la lettre les instructions du Harbourmaster…
Je vois le bateau de la Marina effectuer un léger passage sur la gauche du chenal, et me rassure en me disant qu’ils connaissent les lieux sur le bout de la quille. Pour être franc, toute cette agitation me fait oublier à quel endroit précisément nous venons de heurter le fond, sans doute y-a-t ’il un passage de ce côté !?
On s’engage une seconde fois. Une houle désagréable semble rapidement arriver de nulle part, et au creux de la vague, ROXY ne tarde pas à heurter le fond sablonneux une deuxième fois ! Plantés, je vois subitement le maître de port s’agiter énergiquement en hurlant, debout sur son bateau, s’affolant en pointant le large… Et je comprends instantanément. Une vague approche, plus haute, plus grosse, et risque de coucher le bateau et de nous balayer contre la jetée en béton comme un vulgaire kayak.
Je lâche immédiatement tous les chevaux de notre petit Volvo Penta, les trois pales tournoyant à fond la caisse pour nous dégager de ce mauvais pas… Une vingtaine de personnes s’inquiètent de notre sort sur la berge tandis que le bulbe fini par s’extraire du sable, et on échappe de justesse au pire. ROXY arrive à plus de 4kts en marche arrière dans le port, la vague s’écrasant devant l’étrave et je stabilise le bateau à moins d’un mètre des bateaux de pêche.
J’en ai les doigts qui tremblent. La décision est prise, on retourne à l’emplacement illico.
En réalité, chaque fois qu’un coup d’Est violent souffle sur St Francis, la houle dépose des tonnes de sable devant l’entrée du port. C’est un problème majeur pour les plaisanciers mais aussi et surtout pour les pêcheurs qui, avec leurs nombreuses tonnes de calamars, ont souvent un tirant d’eau avoisinant les 3m. C’est pourquoi l’entrée du port est draguée continuellement, tout au long de l’année, dès que les conditions météo le permettent. Le bémol dans notre cas, c’est que la saison de pêche est actuellement à l’arrêt pour 5 semaines ! (reproduction) Raison pour laquelle le dragage est moins actif en cette période. Sur 30.000 miles parcourus avec ROXY, c’est la 2ème fois que nous avons eu chaud aux roubignolles ! La première étant la fracture du tube de jaumière à quelques 200 miles de Las Palmas, suite à un choc avec un OFNI, occasionnant une petite voie d’eau à bord.
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