Imaginez un volcan dont un versant entier s’est effondré dans l’Océan il y a quelques millions d’années, laissant les eaux salées pénétrer le cœur du cratère.
C’est précisément là que nous nous apprêtons à entrer ; au centre de l’île de Rapa…
ROXY s’engage dans le petit chenal aux premières lueurs de l’aube ; pas de vent, pas une risée, pas un son. L’odeur de la pinède caressée par les premiers rayons du jour est un vrai délice, et on perçoit immédiatement que le paysage diffère complètement. Un court instant on se croirait sur un fjord scandinave, proche du Svalbard. C’est somptueux. Et pour cause, nous sommes sur la seule île de Polynésie où le cocotier ne pousse pas… (L’hiver est trop froid ; entre 5 et 10°C.)
Nous sommes descendus plein Sud, pour atteindre l’île la plus méridionale de Polynésie, loin de tout.
Rapa compte environ 500 habitants et est encore souvent appelée en polynésien Rapa Iti (petite Rapa) pour la distinguer de Rapa Nui (grande Rapa) que tout le monde connait sous le nom français d’Ile de Pâques.
Coïncidence frappante, Rapa et l’île de Pâques se trouvent toutes les deux sur le 27ème parallèle, séparée l’une de l’autre par 3400 km de Grand Bleu…
1200 Km nous sépare de Tahiti, plus de 2000 Km des Marquises, on prend conscience à cet instant que la Polynésie ; c’est grand ! (Rapa est à plus de 17.000 Km de Bruxelles)
Pas d’aéroport, il faut vivre ici en totale autonomie.
A l’écart de toutes les routes commerciales, jusqu’il y a peu, le cargo qui ravitaille l’île ne passait que tous les 3 mois... (Aujourd’hui encore, le carburant par exemple, n’est livré qu’une fois par trimestre. Pour le reste, le bateau ravitailleur fait son entrée dans le volcan une fois par mois environ, dépendant des besoins.) Pour ceux qui désirent rejoindre Tahiti, il faut d’abord entreprendre une traversée de 300 miles nautiques (555km) vers Raivavae avant de prendre un vol vers la capitale. Pour les évacuations sanitaires d’urgence, un hélicoptère se tient prêt à évacuer le blessé vers Raivavae, 2h30 de vol. Un blessé à la fois, l’appareil ne contient qu’une seule place…
Pour l’heure nous attendons la réponse du (seul) policier de l’île, qui nous dira si nous pouvons débarquer ou non, lui qui nous a si gentiment guidé par radio vers l’unique corps-mort mis à disposition des navigateurs. Etant très isolés, aucun risque ne veut être pris par les autorités pour une éventuelle contamination au Covid, ça se comprend.
Au Sud de notre position, plus aucun Être Humain ne vit.
Un désert à perte de vue sur des milliers de kilomètres, que seuls quelques marins d’exception ont l’audace de traverser en de rares occasions…
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